Jean-Paul Gabilliet est professeur d’histoire et civilisation américaines à l’Université Bordeaux Montaigne. Spécialisé dans l’histoire de la bande dessinée américaine, il est notamment l’auteur de Des Comics et des hommes : histoire culturelle des comic books aux Etats-Unis (Editions du Temps, 2005).
Bibliographie sélective
R. Crumb
Robert Crumb devint à la fin des années 60 le pape de la bande dessinée underground américaine. Né en 1943 dans une famille typique de la petite classe moyenne de l’après-guerre, il s’imposa à l’âge adulte comme le premier satiriste de la contreculture, avec des personnages mémorables tels que Fritz le chat, jouisseur cynique et désabusé, et le gourou roublard Mr. Natural.
Au détour de rencontres avec Janis Joplin, Jim Morrison, Charles Bukowski et bien d’autres, il marqua les années 70 en pornographe vilipendé par les féministes et les gardiens des bonnes moeurs. Mais il se révéla dans la suite de sa carrière comme un créateur aux facettes multiples, illustrateur et musicien aussi bien inspiré par sa nostalgie des années 20 et 30 que par la vie de Kafka et la Genèse.
De Philadelphie à Cleveland, de la Californie aux Cévennes, ce livre retrace la vie et l’oeuvre de Robert Crumb, baby-boomer qui quitta à dix-neuf ans la famille dysfonctionnelle dans laquelle il avait grandi pour devenir d’abord l’auteur de bandes dessinées le plus emblématique de la révolution hippie puis, à la fin du XXe siècle, un des principaux pères spirituels des romans graphiques de la nouvelle BD américaine.
Cet ouvrage est la première biographie de Robert Crumb. Dessinateur autodidacte au talent exceptionnel, il fait depuis toujours scandale en raison de ses incursions dans la pornographie mais aussi dans une satire sans concessions où il met en scène ses propres angoisses envers les femmes mais aussi toutes les pulsions honteuses de la société américaine, son racisme et son conservatisme.
Des comics et des hommes: Histoire culturelle des comic books aux États-Unis
Aux États-Unis, les comic books sont un secteur du monde de l’édition et un phénomène culturel. C’est dans les années 30, au cœur de la Dépression économique, qu’apparurent les fascicules agrafés qui prirent le nom de « comic books ». Jean-Paul Gabilliet retrace l’épopée éditoriale de ces parutions, avec ses pics, ses crises, ses rebondissements et ses acteurs souvent hauts en couleurs. L’auteur nous emmène dans les coulisses commerciales et économiques d’un secteur de l’industrie culturelle en esquissant tout d’abord une typologie des créateurs de comic books à travers le temps : leurs origines sociales, leurs formations scolaires, leurs combats (presque toujours vains) pour faire valoir leurs droits auprès d’éditeurs seulement soucieux de rentabilité. Puis, à partir d’une batterie d’enquêtes et de sondages dont les plus anciens remontent aux années 1920, il répond à la question : « Qui lit des comic books ? » Enfin, il précise la position de la bande dessinée et des comic books dans la hiérarchie culturelle aux États-Unis : les discours de censure contre les illustrés, stridents au cœur de la guerre froide et plus insidieux aujourd’hui. Pour les curieux et les collectionneurs, le livre contient aussi deux bandes dessinées, l’une fantastique, l’autre sentimentale, reproduites en noir et blanc à partir de leurs planches originales. Des Comics et des hommes est un ouvrage grand public qui pourra s’avérer extrêmement utile aux chercheurs francophones désireux d’approfondir leur connaissance de ce domaine encore peu exploré de l’histoire culturelle américaine.