Bibliographie sélective
Les Chevaux
Le ciel est bas, un cheval erre dans des plaines désolées. Il est rapidement rejoint par un troupeau de créatures mi-chevalines, mi-humaines.
Dans Les chevaux, la réalité s’introduit par bribes. Des coupures de journaux, un bus qui semble nous emmener au bout du monde, une femme dont la silhouette n’est pas sans rappeler celle de Mary Poppins… les images défilent et s’entrechoquent pour former l’ultime rêve d’un vieil homme.
Le dessin de Vanoli fait d’autant plus ressortir les sensations et les matières que les planches sont muettes. Un récit humide et charbonneux.
La grimace
La rue Thiers, celle qui fut jadis, au temps des usines, l’une des plus bruyantes de Longwy, est désormais silencieuse. Dans une maison, à l’abri d’une fenêtre, protégé par le temps qui s’est écoulé, Vanoli découvre les silhouettes fantomatiques de ses camarades d’enfance dont les visages grimaçants le plongent dans son passé.
C’est à un voyage dans le temps doux-amer que nous convie Vincent Vanoli. Doux parce qu’il a la saveur de l’enfance, du temps suspendu qu’étire la contemplation des escargots dans le potager. Doux encore, comme le « lait-lait » que l’on boit avec les copains tandis que la maison familiale avec son grenier, ses passages secrets et ses escaliers offre un terrain de jeux et d’aventures hors-pair. Un monde archaïque qui pourtant va peu à peu se craqueler et révéler son impermanence… Les relations sociales se compliquent, le cocon familial laisse apparaître des dissensions, tandis que sévit, dans le bassin lorrain, la crise de la sidérurgie.
Vanoli en est conscient, le temps qui passe sédimente et déforme les souvenirs, estompant certaines expériences pour mieux en révéler d’autres qui s’agrègent, formant une mythologie personnelle. Avec son dessin expressionniste et texturé aux subtiles nuances de gris, ses personnages sautillants, Vanoli nous immerge avec un humour grotesque dans son enfance lorraine. Un récit tournoyant aux allures de songe.
Le femme d’argile
Un étrange personnage amnésique s’extirpe d’un bois sombre, une femme derrière sa fenêtre épie son retour et un
vieil homme monologue sur leurs secrets communs, chacun questionnant la vie et les actes des autres. Un meurtre dissimulé, un atelier de sculpteur peuplé de fantômes, du théâtre de foire, une passion dévorante, la nuit. Voilà le décor planté pour ce nouvel ouvrage de Vincent Vanoli chez 6 Pieds sous terre. Dans une ambiance proche du cinéma expressionniste, dont il est grand adepte, Vincent Vanoli propose un polar nocturne et rétro, aux teintes blafardes et empreint de fantastique, mettant en scène une passion amoureuse et criminelle entre un inquiétant sculpteur
et ses modèles. La présence, en voisin voyeur, d’un vieil homme semblant tirer les ficelles du drame qui se noue et s’exprimant à la place des amants, mimant leurs questionnements, ajoute une dimension étrange à l’atmosphère pesant sur les personnages. En creux, l’auteur nous parle de l’acte de la création, de donner la vie comme de donner la mort, de donner sa vie pour nourrir l’inspiration, comme exutoire à un quotidien morne et routinier, ou plus personne ne s’appartient.